La souffrance intérieure relative à des événements de moindre importance est aussi valable que l'autre. Tout est dans cette écharde dans la chair dont parle St Paul. Nos repentirs peuvent équivaloir au déluge, et je puis plus souffrir de mes médisances, de mes regards sensuels que des persécutions aux juifs. L'un n'empêche pas l'autre d'ailleurs et l'ensemble constitue une fin de vie que je n'attendais pas [.] J'ai reçu la visite d'un garçon de 18 ans, employé de banque qui fait de la peinture.
Il a fini par m'avouer qu'il voudrait entrer dans le sein de l'Église. J'ai obtenu qu'on le prenne "en retraite" au petit monastère d'ici. Il s'appelle Jacques Doucet. Prie aussi pour mon pauvre frère aîné emprisonné à Quimper sans prétexte. Excuse ma brièveté et crois moi fidèle Max ».2- Gaston Jacob, frère aîné de Max, est arrêté en 1942 à Quimper. Il meurt en déportation à Auschwitz l'année suivante. Figure centrale de l'avant-garde montmartroise et montparnassienne, converti en 1915 au catholicisme après avoir eu plusieurs visions, Max Jacob quitte Paris en 1936 pour s'installer à Saint-Benoît-sur-Loire dans le Loiret. Il y mène une vie monacale. Ses travaux poétiques et médiations, en partie reprises par Pierre Lagarde dans son admirable ouvrage Max Jacob - Mystique et martyr (La Baudinière, 1944), se rapprochent du courant quiétiste.
Il assume dès lors sa vie de pêcheur comme condition de sa rédemption. Ses origines juives lui valent, six mois avant la libération de Paris, d'être arrêté par la Gestapo, destin qu'il accepte comme un martyr. Il est interné par la gendarmerie française au camp de Drancy et y meurt cinq jours plus tard, quelques heures avant sa déportation programmée pour Auschwitz. Archives Pierre Lagarde Puis collection particulière, Christie's, 14 déc.Max Jacob - Mystique et martyr, éd. Pierre Lagarde, La Baudinière, 1944, p.