Intéressante lettre autographe signée de Mme Alfred VALETTE dite RACHILDE (1926)

  

Réponse à une enquête littéraire initiée par l'écrivain Marius BOISSON (Paris, 1881 - Étrigny, 1959), pour le compte du journal culturel Comodia. 2 pages in-8°, datées de Paris le 10 juin 1926, à en-tête du Mercure de France, avec enveloppe jointe, ainsi que le questionnaire imprimé. 1° Ne pensez-vous pas que certaines ouvres ont été nuisibles à l'essor et au bonheur de l'humanité, en faisant disparaître un idéal ancien, ou en créant une philosophie et même une religion?

Je pense que, sans exception, toutes les littératures dites religieuses ont fait du mal à l'humanité! Le roman de l'âme lui enseignant, ou lui suggérant, l'illusion d'une seconde vie meilleure lui a fait oublier la vie réelle et, par conséquent, négliger l'amélioration du sort purement humain.

On a couru après des biens qui n'étaient pas de ce monde et on s'est même entretué au nom de ces biens chimériques : Tout bonheur que la main n'atteint pas... 2° Croyez-vous que des ouvres littéraires puissent pervertir un être, ou lui communiquer le dégoût de la vie? Je ne crois pas qu'une ouvre littéraire, sans aucune prétention à la sociologie ou à la philosophie, puisse nuire à personne. Le goût (ou le dégoût) de la vie, on le porte en soi. Lire un roman c'est respirer une fleur.

Autant en emporte le vent de la bonne odeur ou du mauvais parfum! 3° Si vous pouviez détruire dans le monde tous les exemplaires d'un ouvrage, quel est celui que vous condamneriez?

Mais les miens, à l'exeption de trois... Ce qui n'est pas beaucoup sur quarante huit volumes.